Guillaume Cayet signe un diptyque récemment paru aux éditions Théâtrales; une immersion mal-aisante au cœur d’une France rurale en pleine mutation et une volonté de dire le monde tel qu’il est, faillible et anxiogène.
Les immobiles
Un couple de citadins prend un nouveau départ et s’installe dans une jolie bourgade de province. L’objectif : une nouvelle vie, le calme et la sérénité des choses simples. Mais très vite les habitants du village se montrent intrusifs, bouleversant le quotidien du couple et phagocytant jour après jour leur projet de vie. Cette première pièce se distingue avant tout par une belle maitrise du crescendo dramatique, une sensation d’étouffement grandit en effet chez le lecteur à mesure que la pression s’accentue autour du couple.
« Les conseillers municipaux : C’est plutôt joli, n’est-ce pas ? Là , il y ale cimetière, là la colline, là les petites crêtes. Ici c’est devant la mairie, on s’est réunis, c’est pour vous, c’est. Dans le calendrier c’était marqué : date, jour, heure. Votre arrivée. Votre possible arrivée. Vous avez fait bon voyage ? C’est plutôt joli. Le train, c’est ça, vous avez pris le train, nous aurions su, avec les valises, nous serions venus vous chercher à la gare. »
Proposition de rachat
Construit en miroir ce deuxième volet prolonge le processus démarré précédemment. En lieu et place de cette France des campagnes qui se meurt, c’est une cellule familiale que l’on voit ici se gangréner. Toujours ancrée dans un univers sombre mais non dénuée d’humour, l’écriture de Guillaume Cayet offre ainsi un regard quasi-sociologique sur une société où prime l’individualisme. Un regard froid simplement rehaussé d’une nuance de surréalisme dans la mise en forme, notamment avec une utilisation particulière de la ponctuation.
« Gaspard : Chers habitants, notre monde rentre dans une période dite de transition, c’est elle qui prend le pas sur la tradition, croyez-moi. Je suis revenu, vous savez, comme l’on dit, le fils prodigue, le fils tient du père et le père plus qu’à un fil, alors que faire ? Couper d’un vulgaire coup de ciseaux, repeindre en plastique et béton sur une peinture à l’herbe ? Comprenez : ce monde tel que vous l’avez subi vit ses derniers instants, c’est à vous d’y devenir acteurs. »
Audrey Jean
« Les immobiles / Proposition de rachat » de Guillaume Cayet
ISBN 978 2 84260 672 5
14,90€
éditions Théâtrales