Théâtre : Avignon 2022 – « Augustin Mal n’est pas un assassin » de Julie Douard

Le théâtre des Halles met actuellement à l’affiche Augustin Mal n’est pas un assassin de Julie Douard. La profondeur de ce magnifique texte, grinçant à souhait, témoigne d’une étude psychologique pertinente d’un banal profil de prédateur. Ce seul en scène, brillamment interprété par François Bureloup, explore les confins de la folie.

Augustin Mal n’a pas volé son nom puisque ce prédateur, qui ne paye pas de mine, s’avère être un psychopathe de la pire espèce. A l’allure quelque peu simple et débonnaire voire infantile, il offre un visage respirant l’innocence et la banalité. Cette pièce, intelligemment mise en scène par Olivier Lopez, interroge la problématique du mal et de la folie. Force est de constater la variété de ses différents visages. Augustin Mal échappe, pour sa part, à tous les standards connus en la matière. Son insipidité et sa discrétion deviennent sa force tranquille, celle d’une perversité violente et criminelle. Julie Douard a parfait la psychologie d’Augustin en la chargeant d’une misogynie aux racines purement homosexuelles. Fasciné par les femmes, il s’acharne à les détruire afin de conserver son idéal personnel féminin.

Vivant dans son monde obéissant à ses propres règles, Augustin a pris soin de tapisser son existence d’une philosophie puérile et simple justifiant avec logique ses actes de démence. Le propos progressif de la pièce permet une gradation dans l’horreur de la démence qui se dévoile peu à peu créant de facto un effet terrifiant. Le jeu remarquable de François Bureloup nous offre une litanie de logorrhées qui assoit son personnage dans la démence. Cette lecture de la folie d’un Monsieur-tout-le-monde représente à l’échelle de notre société un danger d’autant plus important qu’il s’avère difficile à débusquer.

Laurent Schteiner