Théâtre : « Entrée des artistes » de Ahmed Madani

Ils sont sept à briser le quatrième mur où chacun tisse un pont avec le public. Si le théâtre constitue le miroir de nos réalités, il n’en demeure pas moins qu’il finit par s’estomper lentement. Qu’en reste-t-il ? Un partage de fait où chacun se retrouve dans l’autre, le spectateur dans le comédien et vice et versa. Fruit d’une enquête auprès des jeunes comédiens, Ahmed Madani expose sans détours certains itinéraires où le poids de l’espace familial a pu compliquer l’épanouissement de certains  où encore dans une radicalité des abus sexuels qui ont souillé d’autres jeunes. Mais tous, par hasard ou par désir se sont orientés ou retrouvés sur la scène théâtrale. Que représente-t-elle si ce n’est une catharsis propre à refermer les cicatrices. Un espace où la parole, le verbe apportent un baume inespéré sur les avatars de la vie. La parole se délivre sur scène, chacun peut goûter à cette vérité nue, sans fioritures,  dans une authenticité et une communion parfaites.

Les parcours délivrés et assénés sont tous émouvants. On partage cette détresse qui les a finalement portés avec bonheur vers le théâtre. Si les cicatrices ne sont pas toutes refermées, ces jeunes ont retrouvé le goût de vivre et de continuer à rêver. C’est dans une belle mise en scène et une folle énergie que ces comédiens nous embarquent dans un face à face avec eux-mêmes, avec nous-mêmes. S’il ne devait rester qu’un souvenir de cet échange, ce serait la mise à nue de cÅ“urs gros comme ça déposés sur scène.

Laurent Schteiner

« Le monde entier est un théâtre où tous – tous les hommes, les femmes – sont de simples acteurs. Ils y ont leurs entrées, leurs sorties, et chacun joue bon nombre de rôles. » 
Shakespeare, Comme il vous plaira, acte II, scène 5.