Le canard sauvage d’Henrik Ibsen est actuellement à l’affiche du théâtre de la Colline. La mise en scène de Stéphane Braunschweig est efficace et originale. Il recrée avec force le propos de cette très belle pièce en usant des techniques de scénographie qui soulignent la dramaturgie de l’œuvre. Une belle réussite !
Deux amis, Gregers et  Hjalmar se retrouvent lors d’une réception. Celle-ci est organisée à l’initiative du père de Gregers, Werle un riche négociant. Ce moment  permet à ces deux amis, qui ne s’étaient pas vus depuis longtemps, de se retrouver et de parler du passé. C’est ainsi que Gregers apprend toutes les libéralités dont a fait preuve son père envers Hjalmar pendant son absence. Hjalmar s’est marié avec Gina, l’ancienne bonne de ses parents. Gina avait démissionné à la mort de sa mère pour épouser Hjalmar. De leur union naitra Hedvig qui a désormais une quinzaine d’année.
Comme à l’habitude, chez Ibsen, les personnages sont fortement marqués. Du père Werle, absent de la pièce mais omniprésent à travers une vidéo omniprésente, écrasante, voire pesante. On ressent le poids qu’il a exercé sur Gregers qui a du s’éloigner pour survivre. Werle est sur le point de se remarier. Gregers, son fils soupçonne les liens du passé qui a pu jadis réunir Gina et son père.  Epris d’admiration pour Hjalmar, il n’a de cesse de lui ouvrir les yeux sur son mariage avec Gina. Un mariage qui repose, selon lu,i sur des mensonges. Cet homme épris d’idéal recherche la vérité absolue. Relling le médecin, ami de Hjalmar, connait sa véritable nature. Une personnalité pauvre qui n’a pu s’épanouir qu’à travers le foyer offert par Gina. Mais dans ce couple, tout est factice. A l’image de leurs relations de couple qui reposent sur de faux-semblants et un amour filial d’Hedvig surdimensionné en raison du manque affectif qu’elle ressent. Enfin, le père de Hjalmar qui vit chez eux, a été incarcéré pour un crime commis par Werle, le père de Gregers.
Le coup de théâtre aux trois-quarts de la pièce marque le tournant de cette histoire où tout vacille, y compris la scénographie, dont la « boîte » s’incline au fur et à mesure imperceptiblement. Cet effet donne un cachet supplémentaire au propos qui se joue. Cette pièce bascule dans le burlesque mais également dans la tragédie où la réalité est tordue. Les réactions sont en parfait décalage avec la réalité donnant un sentiment de malaise et d’oppression. Seul Relling demeure dans la réalité.
Cette pièce est dominée par l’ombre de ce canard sauvage estropié et recueilli par Hedvig. Cet animal, assurément, constitue une palette de symboles qui est utilisée par la famille de Hjalmar comme un exutoire à tous les maux de leur vie. De la liberté à son contraire, ce canard revêt tout le champ des couleurs possibles projetées par les protagonistes de cette pièce. Courez voir ce beau spectacle !
Laurent Schteiner
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Le canard sauvage d’Henrik Ibsen
Traduction du norvégien par Eloi Recoing
mise en scène et scénographie Stéphane Braunschweig
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Avec Suzanne Aubert, Christophe Brault, Rodolphe Congé, Claude Duparfait, Luce Mouchel, Charlie Nelson, Thierry Paret, Chloé Réjon
Scénographie : Alexandre de Dardel
Costumes : Thibault Vancraenenbroeck
Lumières : Marion Hewlett
Son : Xavier Jacquot
Maquillages et coiffures : Karine Guillem
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Photo © Elizabeth Carecchio
Théâtre de la Colline
 5 rue Malte-Brun
 75020 Paris
 www.colline.fr
du 10 Janvier 2014
au 15 février 2014
du mercredi au samedi à 20h30, le mardi à 19h30 et le dimanche à 15h30
Et également chez Actes Sud Papier, vous pouvez retrouver l’œuvre complète :
Prix : 19 € -ISBN : 978-2-330-02703-2