Plus de deux heures, en compagnie de personnages grandioses et pathétiques, dans une mise en scène épurée signée Bernard Levy, à l’Athénée, on ne se lassait pas d’attendre Godot. Pas le temps de s’ennuyer : la pièce nous entraîne dans un univers surréaliste où le temps et l’espace ne possèdent ni emprise, ni sens. Le temps passe inexorablement, mais l’absurde reste.
 Estragon et Vladimir, deux vagabonds usés, parlent de chose et d’autre. Estragon est obnubilé par sa chaussure qui lui fait un mal horrible. Vladimir, lui, médite sur la vie. Ils attendent tous deux la venue improbable de Godot. Ils ne savent pas vraiment qui il est, mais espèrent qu’il apportera une réponse à toutes leurs attentes. Celui-ci n’arrivant pas, Vladimir et Estragon continuent de parler, pour occuper le temps, comme pour combler l’intolérable vide. Au lieu de Godot, deux nouveaux personnages font leur apparition : Pozzo et Lucky, le second, tenu en laisse par le premier. Après leur départ, un jeune garçon annonce à Vladimir et Estragon que Godot ne viendra pas ce soir, mais peut-être demain. Le lendemain, même heure, même endroit, les deux compères passent le temps en attendant Godot.
 Â
Allégorie d’une existence vaine ou parabole d’un indéfectible espoir ? Aliénation ou liberté ? La lecture est multiple mais la qualité de jeu reste unique Il serait vain de tenter une énième interprétation de cette pièce, l’auteur ne s’y risquait pas lui-même. On ne retiendra que la simplicité et la justesse de la langue de Beckett, soulignée par la sobriété de la mise en espace, un dépouillement qui pousse au confinement des êtres. Dans sa scénographie, Bernard Levy affirme, cependant un choix clair : coller au plus près des exigences de l’auteur. En effet, si Godot est absent, le texte, lui, est présent en exergue à la scène, projeté en ouverture.
Bernard Levy et toute son équipe nous offre là une sorte de Mythe de Sisyphe burlesque, d’une qualité technique et artistique rarement égalée. Chapeau aux comédiens qui nous livrent une prestation sans fausse note, magnifique et pathétique. Pari tenu : on n’attendait pas moins de cette pièce qu’elle nous surprenne, qu’elle nous dérange, qu’elle nous émeuve.
Â
Â
Sabrina Amghar
Â
En attendant Godot de Samuel Beckett
Â
mise en scène : Bernard Levy
Â
avec : Gilles Arbona, Thierry Bosc, Garlan Le Martelot, Georges Ser, Patrick Zimmermann
Assistant à la mise en scène :  Jean-Luc Vincent
Chorégraphie : Jean-Claude Gallotta
Décor : Giulio Lichtner
Lumières : Christian Pinaud
Son : Marco Bretonnière
Costumes :Â Elsa Pavanel
Assistante costumes : Séverine Thiébault
Maquillages, coiffures : Bérangère Prost
Crédit photos : Philippe Delacroix
Â
L’ Athénée -Théâtre Louis Jouvet
Square de l’Opéra Louis-Jouvet
7 rue Boudreau – 75009 Paris
Réservations : 01 53 05 19 19
Du 18 janvier au 27 janvier à 20h
Â