Festival Pampa : « ‘L’ours » d’Anton Tchekhov

Le Festival Pampa offre un cadre unique puisqu’il a la particularité de se dérouler chaque année hors les murs, en pleine nature. Dans cet espace unique, les pièces qui nous sont offertes confèrent une dimension surprenante au déroulé des propos. A ce titre, L’Ours d’Anton Tchekhov confère au sein d’une scénographie naturelle une réalité confondante au propos de cette comédie.

Dans cette pièce courte, Tchekhov met aux prises une jeune veuve éplorée Elena Ivanovna Popova qui vit recluse, perpétuant son deuil. L’arrivée soudaine de Gregori Stepanovitch Smirnov va bousculer la tranquillité d’Elena. Gregori, propriétaire terrien, acculé par un monceau de dettes, dispose d’une créance à l’endroit de feu le mari d’Elena. Contraint de se retourner contre elle pour satisfaire ses propres débiteurs, Gregori tente par tous les moyens de faire fléchir Elena afin de récupérer son dû.

La mise en scène de Florent Hu verse dans une version aux contours modernes en utilisant cet espace naturel que confère la campagne environnante. N’hésitant pas à briser le quatrième mur, Elena prône sa misanthropie justifiant sa réclusion du monde alors que Gregori prenant appui sur le public bâtit un argumentaire de la misogynie à faire pâlir toute idée progressiste en la matière. Ce texte, écrit au XIXe siècle quant à la place de la femme dans notre société, résonne avec force dans le contexte de nos préoccupations sociétales actuelles. Les trouvailles de mise en scène sont amusantes et décalées. Citons à titre d’exemple la version de Queen, I want to break free entonnée par Louka, le valet, ramassant les feuilles mortes avec son râteau. La cadre naturel du décor est propice à une interprétation originale qui donne à cette oeuvre une authenticité extraordinaire. Les comédiens se démultiplient avec talent et générosité dans cet espace vert à proximité de la demeure d’Elena. Cette comédie prend une nouvelle dimension en nous plongeant dans un magnifique réalisme de proximité.

Laurent Schteiner