Dans le cadre du Festival Traits d’Union  la compagnie le cri de l’escargot nous présentait récemment sa dernière création « Gênes 01 » tirée  du texte pour le moins sidérant de Fausto Paravidino. Ce spectacle ambitieux réussit dans l’ensemble son pari et se distingue notamment par la force de ces images et la foisonnance de sa scénographie.
Fausto Paravidino est reconnu pour sa plume corrosive, et « Gênes 01 » ne déroge pas à la règle. Ce brûlot trépidant revient en effet sur la répression extrêmement violente et disproportionnée du gouvernement de Silvio Berlusconi face aux mouvements altermondialistes venus protester lors du G8 de 2001. Construit en thriller, le texte est diablement efficace, il décrit en détail la succession des événements sur trois journées mouvementées, dessinant un maillage complexe qui apportera au final on le sait son lot de drames. Jenny Lepage s’empare de l’écriture de Paravidino  avec intelligence, elle voit dans ce théâtre documentaire une forme de tragédie moderne, mettant en scène une forme chorale plutôt efficace dans son ensemble. La scénographie est particulièrement inventive, beaucoup de propositions sur la forme qui alourdissent quelque peu le propos, la pièce gagnerait peut-être en corrosivité, en âpreté si elle faisait parfois preuve de moins d’artifices. Cependant certains effets sont parfaitement réussis notamment le travail autour de maquettes et de théâtre d’objets, et l’investissement des comédiens autour de ce sujet tragique nous fait vite oublier ces petits péchés d’excès. Il faut dire que l’écriture de Paravidino sait tenir le spectateur en haleine tant la construction ciselé du texte hypnotise et opère un crescendo savamment maîtrisé. La direction d’acteur appuie cet effet avec brio, l’équipe au plateau démarre le spectacle sur une note grotesque apportant une distanciation drolatique avec la violence des faits et le cynisme ambiant pour glisser peu à peu vers un jeu plus naturaliste, plus proche du réel. Comme pour mieux marquer son empreinte, le spectacle s’achève sur un parallèle avec les deux derniers années en France, marquées par  des mouvements de protestations face à la gouvernance Macron et un climat pour le moins tendu avec les forces de l’ordre. Une touche finale coup de poing et une mise en perspective glaçante donnant beaucoup de sens à cette proposition de la compagnie le cri de l’escargot.
Audrey Jean
« Gênes 01 » de Fausto ParavidinoÂ
Mise en scène de Jenny LepageÂ
Avec Stéphanie Fumex, Marine Sigismeau, Valentin Johner, Yohan Leroy, Côme Paillard et Stéphanie Pitoun
Bruno Dieudonné Dramaturge, scénographe, vidéaste
Jean Buchanan Plasticienne
Julien Musquin  Musique
Festival Traits d’union au Théâtre El DuendeÂ