Le théâtre 13 nous propose actuellement une jolie pépite à travers le spectacle de Naomi Wallace mis en scène par Roland Timsit, La carte du temps. Ce sont trois visions du Moyen-Orient qui nous sont proposées en alliant finesse et sensibilité poétique. Naomi Wallace, en se plaçant sur le terrain de l’humain et non du territoire, nous livre un instant théâtral chargé d’émotion et d’humanité où l’humour constitue l’arme suprême devant l’insupportable.
Ce triptyque décliné en 3 volets nous emporte dans des univers bien différents touchant à l’enchevêtrement des sentiments de familles déchirées par un conflit sans fin. Naomi Wallace a choisi d’aborder ces transports émotionnels avec une extrême finesse en les transposant différemment.
Mourid, scientifique palestinien a décidé de faire don des organes de son fils tué par erreur par des soldats israéliens. Naomi Wallace touche avec acuité un sentiment universel consistant à retrouver la personne receveuse des organes de. Sa quête le guide dans une clinique de Tel Aviv où travaille Tanya Langer, une aide-soignante en passe de devenir infirmière. Malade de la mucoviscidose, Tanya a subi récemment une transplantation des poumons. Mourid la rencontre pour lui annoncer que désormais ils sont intimement liés, Tania, devenant le prolongement de son fils. Le fossé, qui les sépare, ressurgit avec force devant cette tentative de tisser un lien fort par-delà la haine. Ce premier volet humaniste est de toute beauté. Nous confondant en plein cœur dans des registres différents, cette pièce nous ramène à l’essentiel, celle de l’humain !
La deuxième pièce, davantage poétique, repose également sur une actualité brulante. Malgré un relief fantastique reposant sur le conflit israélo-palestinien, elle foule aux pieds cette frontière en présentant une mère tendant la main à un soldat israélien qui pourrait être son fils. Naomi tend à nouveau vers l’universel en rendant hommage à toutes ces mères, quelles qu’elles soient, palestiniennes ou israéliennes qui ont perdu un fils.
La troisième vision que nous propose Naomi Wallace présente un moment où la désespérance nous est présentée de façon humoristique. Là encore la finesse du trait est superbe et décalé. Ali, collectionneur de pigeons, nous détaille sa vie dans un Irak dévasté par la guerre. La force du texte repose ici sur l’absence de jugement où la fatalité se conjugue à l’humour.
Un carré de terre ou de poussière pour toute scénographie, balayé et rebattu un peu comme l’humanité dans cette partie du monde, est très efficace. La mise en scène, aboutie, colle parfaitement au jeu des comédiens tous excellents. Saluons la performance exceptionnelle de David Ayala qui transcende cette pièce de bout en bout ! Un moment magique de théâtre !
Laurent Schteiner
La carte du temps, trois visions du Moyen-Orient de Naomi WALLACE
mise en scène de Roland TIMSIT
Avec David AYALA (Mourid, Ali), Oscar COPP (Yuval), Abder OULDHADDI (Sami), Lisa SPATAZZA (Tanya Langer), Afida TAHRI (Oum Hisham Quishta) et Roland TIMSIT (Shlomo)
Traduction de Dominique HOLLIER
Texte publié aux éditions Théâtrales (2010)
scénographie et création lumière : Philippe QUILLET
Création sonore / musique : Laurent SASSI
Costumes : Sylvie BLONDEAU
©LOT
Théâtre 13
30 rue du chevaleret – 75013 Paris
du 28 avril au 7 juin 2015
www.theatre13.com
Réservations : 01 45 88 62 22
Le texte publié aux Editions Théâtrales :
Prix : 11 € -ISBN : 978-2-84260-411-0 – 64 pages