« Nous sommes septembre » de Flore Grimaud

par | 21 Déc 2024

C’est avec un magnifique texte onirique et poétique, autour de l’amour, que Flore Grimaud nous livre dans cette parabole enchantée où le verbe joue à tue-tête une partition magique, celle des choses de la vie. Nous sommes septembre est une ode dédiée à l’amour, celui qui ne dure pas mais aussi celui qui est aussi solide que l’airain. Primesautier ou empreint de fureur, il demeure à jamais notre destin. Heidi-Eva Clavier a transformé avec bonheur cet objet théâtral en un magnifique écrin assis sur une très jolie mise en scène. 

De la séparation de ses parents dans son enfance à la convocation du couple iconique que représentaient Alain Delon et Romy Schneider, Flore Grimaud rebat les cartes de l’amour éternel. Elle convoque des figures masculines, iconiques ou non afin de se confronter à ce qui est ou ce qui n’est plus. Ce moment de vérité est pensé comme un tourbillon de maux et de ressentis que trahissent les deux comédiens sur scène. Leurs émotions nous bouleversent tant leur sincérité est prégnante.

La fracture s’opère lentement mais désespérément et soudain la vérité brûle les lèvres et le verdict assassin tombe « Je ne sais plus t’aimer ». Michel Piccoli dans cette chanson interprétée avec Romy Schneider traduit le hiatus le plus terrible d’une fin de relation. Cette histoire de vie autobiographique, hélas devenue ordinaire dans le monde qui nous entoure, crée une construction nouvelle où l’enfant doit s’adapter. Divorce, nouvelle vie avec un beau-père, un père que l’on voit de temps en temps. Flore Grimaud feuillette cet album de souvenirs avec tendresse. Parfois, celle-ci comporte des épines qui font encore mal. La mort de Romy, entrevue dans son cercueil est parlant à plus d’un titre. Flore, à travers un entretien de Romy nous démontre toute la fragilité d’aimer. Une ligne de crête constamment instable où l’un ou l’autre peut chuter. Romy se jetait à corps perdu dans ses rôles pour oublier son quotidien où la tristesse et la nostalgie l’entouraient de son manteau gris. Elle aspirait de toutes ses forces à la liberté et battait en brèche les schémas sociétaux ringards qu’elle abhorrait.  A travers ce couple iconique que formaient Alain Delon et Romy Schneider, Flore Grimaud met en perspective ses attentes, celles d’un monde meilleur où le vieux canevas sociétal cédera un jour la place à une autre voie.

Mais l’amour peut être autre. Comme une large bande de pelouse rappelant le jardin d’Eden où ne règnent que délice, amour et liberté. Délivré du carcan sociétal poussiéreux, cet endroit primesautier jonché de fleurs et de bonheur rend indéfectible l’amour plus libre que jamais et scellé dans le marbre de l’amour.

Ce spectacle, au dispositif bi-frontal permet de partager avec chacun d’entre nous, les errances du sentiment amoureux, sa résilience, l’amertume de ses compromis. Le public est installé au coeur même de la dramaturgie du spectacle. Il devient le témoin et le compagnon de voyage de ces deux personnages qui expriment merveilleusement l’accomplissement de l’amour et de ses errances. Le spectateur se trouve embarqué dans une mélopée de mots autour de la complexité de la psyché humaine. Avec poésie et mystère, Flore Grimaud se fait l’entremetteuse d’un soir d’une réalité sauvage à dompter et déroule avec bonheur son chemin de vie !

Laurent Schteiner
A Alexandre, mon ami.

 

« Nous sommes septembre » de Flore Grimaud

Mise en scène de Heidi-Eva Clavier

avec Flore Grimaud et Manuel Durand

  • Collaboration artistique  Antony Cochin
  • Scénographie : Johnny Lebigot
  • Vidéo : Thomas Bouvet
  • Lumières Léandre Garcia Lamolla
  • Costumes : Patrick Cavalié
  • Crédit photo Aurélie Rouquette

Théâtre de l’Opprimé
78/80 rue du Charolais
75012 Paris
www.theatredelopprime.com

Tournées
Du 30 janvier au 1er mars 2025 au Théâtre de la Reine Blanche

 

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