Phénix Festival : « Amours » de Léonor de Recondo
Dans le cadre du Phénix Festival, le Théâtre de l’Opprimé nous propose actuellement Amours de Léonor de Recondo. Ce récit, qui décrit le récit d’une histoire d’amour impossible entre deux femmes au début du XXe siècle, est un véritable ravissement. La mise en scène de Vanessa Sanchez enlevée et très esthétique est d’une grande beauté. La qualité des interprètes couplée à une très belle création lumière et sonore apporte un cachet à ce spectacle marionnettique.Â
Le récit débute dans une maison bourgeoise où Anselme Boisvaillant, notaire de son fait, vit avec sa femme Victoire dans un bourg du Cher. De ce mariage arrangé, la vie se passe, morne et sans espoirs. Le couple ne peut avoir d’enfant au grand désespoir de Victoire. Elle rêve en lisant Madame Bovary. Céleste, une jeune bonne à leur service tombe enceinte des suites des assiduités d’Anselme. Craignant d’être renvoyée du fait de son état, Céleste tente de cacher son état. Victoire découvre la vérité et impose à son mari de garder Céleste à la condition de devenir la mère du futur l’enfant de Céleste. Céleste accepte que le couple Boisvaillant s’en occupe ayant de temps en temps un droit de regard. Mais à la naissance d’Adrien, et contre toute attente, le destin va rapprocher ces deux femmes l’une vers l’autre.
Ce spectacle est ancré dans une France où les classes sociales étaient fortement marquées ne laissant que peu d’espace à une quelconque émancipation des femmes. Ces dernières écrasées sous un patriarcat pesant tentent de secouer ce joug par la chair. L’abandon du corset, qui imprime les chairs, qui emprisonne le corps en cachant sa sensualité, devient un acte de résistance et de libération de la femme. Il en est de même pour cet amour entre Céleste et Victoire. L’amour de ces deux femmes pourrait sonner le glas d’une société patriarcale poussiéreuse, annonçant la Belle Epoque. Cette période d’entre-deux guerres propice une éclosion artistique et littéraire favorisa une libération des mÅ“urs. Mais la vie n’est pas la même en province et le carcan de ces traditions ancestrales ne se dissout pas si aisément… Elles apprendront à leur dépend que cette société n’était pas prête à quelconque compromission.
Saluons la beauté esthétique de ce spectacle rempli de poésie visuelle où le décorum rose chair entretient un univers intime et chaleureux. La scénographie aurait pu être l’oeuvre d’un aquarelliste fonctionnant par petites touches de couleur. Le jeu de la marionnette ajoute à cet univers une atmosphère feutrée à laquelle la danse répond avec grâce. Les comédiens et danseurs interprètent à merveille cette oeuvre renversante et bouleversante de beauté.
Laurent Schteiner
Amours d’après Léonor de Recondo
Adaptation et mise de scène de Vanessa Sanchez
avec Déborah Coustols, Emmanuel Leckner et Aurélia Poirier
- Création lumière : Laurent Gachet
- Création son : David Gubitsch
- collaboratrice danse : Jessica Fouché
- Scénographe : Blandine Vieillot
- Costumière : Odile LafforgueÂ
- Conseiller marionnettiste : Pascal LaurentÂ
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