Phénix Festival : « La force du coquelicot » de Lydia Cherton

Le Phénix Festival nous présente un magnifique spectacle au théâtre de l’Opprimé, La force du coquelicot de Lydia Cherton. Ce spectacle constitue une ode à la vie dans un relief poétique et bouleversant. Ce voyage, au coeur de nos aspirations et nos attentes les plus folles en une vie rêvée ou espérée, est mis en scène avec brio par Bruno Banon avec élégance et sobriété. 

Non loin d’une falaise escarpée gît une femme évanouie, son vélo couché à ses côtés. Un homme, penché sur elle, tente de la réanimer. Elle reprend peu à peu ses esprits. Elle l’invective. L’inconnu surpris par cette réaction inattendue entrevoit l’issue fatale à laquelle elle se destinait. Se sentant entièrement responsable de cette jeune femme, il ne peut la laisser dans cet état. Il entreprend avec elle un dialogue susceptible de la mener sur les chemins de la raison. Elle s’appelle Julie et son coeur en berne parle pour elle. Son âme bleuie par les coups a été vidée de sa substance nutritive de sentiments. Ses désirs sont éteints comme une chandelle que l’on a soufflée et dont la fumée rappelle tant de souvenirs heureux et douloureux. Le vide représente désormais pour elle une dernière bouffée d’oxygène, justifiant cet ultime souffle de vie avant de tirer sa révérence. A l’inverse de Julie dont les désirs ont été asséchés, Félix a vu la mort s’inviter dans sa vie. Fragilisé et tétanisé, il ne sait comment avancer. Sa petite fille lui donne toutes les raisons d’espérer en la vie. Ce moment suspendu, voire magique, éclaire sous un soleil nouveau, une raison d’espérer à ces deux êtres que la vie a cabossé.

Les deux comédiens, Lydia Cherton et Julien Joerger, baignent dans la sensibilité à fleur de peau de ce texte. Ils sont authentiques et leur sincérité est bouleversante. La mise en scène de Bruno Banon renforce la subtilité de ce texte, en créant un univers à la mesure de sa poésie. Dans cette ode à la vie, Julie a la force indomptable de ce coquelicot !

« Si vous la cueillez, elle s’éclipse direct en vous laissant un truc qui ne ressemble plus à rien dans les mains. Une petite fleur qui du haut de ses quelques centimètres vous dit merde bien en face : « Je vis là où j’ai choisi de pousser ou ciao bye bye, je me barre » ! On ne s’approprie pas un coquelicot ! Ce petit truc tout fragile d’un rouge si flamboyant ne finit jamais en bouquet. Pas assez résistant. Il a fait de sa fragilité une force incroyable. » 

Laurent Schteiner