En aparté : Armelle Deutsch
Armelle Deutsch, qui mène de front une carrière au cinéma et sur le petit écran, nous a livré un entretien passionnant lors de la dernière création théâtrale de Franck Harscouët dans le cadre du Phénix Festival au Studio Hébertot.
A la lecture de votre bio, comment expliquez-vous que vos rôles ne soient calibrés que dans un registre essentiellement dramatique ?
Ayant commencé très jeune le théâtre, à 13 ans, j’ai été rapidement aspirée vers la comédie. Au théâtre avec René de Obaldia Du vent dans les branches de Sassafras dans une mise en scène de Thomas Le Douarec. Puis au cinéma avec Le placard de Francis Véber et également avec Claude Zidi. Puis à un moment donné, on m’a proposé l’Affaire Villemin sur Arte et France 3 dans une mise en scène de Raoul Peck. Et à partir de là , les propositions dramatiques se sont enchainées. A y regarder de plus près, j’arrive bien à m’épanouir dans ces rôles à la frontière de la folie. Avec le personnage que Franck m’a confié dans Je m’appelle Adèle Bloom, je vais encore plus loin. Mais je sais que je n’ai pas fini de tout explorer. Ce qui m’intéresserait serait d’être davantage borderline tout en restant drôle (cf. Woody Allen).
Par manque de temps ou manque de propositions, le théâtre semble avoir été quelque peu délaissé…
Quand j’ai commencé à travailler avec Thomas Le Douarec, j’avais 18 ans, j’étais au Cours Florent, je rêvais de faire le Conservatoire et de rentrer à la Comédie Française. Chez Florent, j’ai rencontré un agent qui faisait des castings et j’ai décroché ce rôle dans ce film avec Francis Veber. Cela a été une spirale. Et comme je ne viens pas du tout de ce métier, on m’a fait comprendre que je ne pouvais pas tout faire. A charge pour moi de délaisser le théâtre. Si je décidais d’être comédienne au cinéma, je devais me concentrer sur cet objectif. Cet agent n’était pas de bon conseil ! Cela m’a surement fermé des portes au théâtre à un moment donné. Après on m’a proposé des rôles au théâtre qui ne me plaisaient pas forcément. Concernant, Je m’appelle Adèle Bloom, nous portons ce projet avec Franck depuis 4-5 ans ! Si je mets autant de temps à remonter sur les planches, c’est que ça m’a manqué terriblement. Il s’agit de mon essence première. J’ai vraiment envie d’écrire une autre page avec le théâtre.
Vous vous sentez davantage libre sur une scène théâtrale que sur un plateau de cinéma ?
Complètement. Etre en direct est primordial. Au théâtre comme au cinéma, tout repose aussi sur les acteurs et la mise en scène. Mais au cinéma, il y a une question d’image plus de l’actrice que du personnage. Au théâtre, c’est l’inverse, le personnage prime avant tout.
Comment êtes-vous entrée dans ce projet Je m’appelle Adèle Bloom ?
Je connais Franck depuis longtemps. A la lecture de ce projet, j’y ai tout de suite cru. Après le Covid, c’était un sujet risqué. On a fait 4 lectures à Paris. On croyait très fort à ce projet. On s’est accroché et on s’est tous fait confiance mutuellement. Quoiqu’il arrive, on mènerait ce projet au bout tous ensemble.
Comme Franck vous a demandé de travailler votre rôle ?
On avait fait un travail à la table. Franck dispose d’une culture assez impressionnante de vieux films. Il a également fait beaucoup d’études littéraires. Il m’a apporté énormément de choses par rapport à sa culture cinématographique. Franck connaissait tout de mon parcours professionnel. Ce qui lui a permis de trouver des ressorts en moi permettant d’enrichir la pièce.
Que représente pour vous l’apport du Phénix Festival ?
Je ne connaissais pas ce festival en raison de sa jeunesse. Je pense que c’est une idée fantastique. Il est vrai qu’il ne sert que 18 spectacles mais je pense que l’investissement de tous ces théâtres est formidable pour accueillir des pièces qu’ils n’avaient jamais vues, même en lecture. C’est une belle prise de risque de leur part. Ce festival nous garantit une belle promo avant Avignon et nous permet de bénéficier d’un certain crédit. Cela nous a permis de recevoir des directeurs de théâtre pour éventuellement une future programmation sur Paris.
Forte de cette expérience, comment abordez-vous le Festival d’Avignon ?
Je l’aborde de façon plus sereine l’ayant déjà joué 3 fois au Phénix Festival, pour détecter d’éventuels défauts. C’est une grosse chance d’y avoir participé. Il s’agit d’une expérience très précieuse avant Avignon. A ce titre, je me suis rendu compte de l’engagement sportif et athlétique que demande cette pièce.
Quels sont vos projets d’écriture ?
Je coécris un long métrage adapté d’un roman et une série pour la télévision ou pour les plateformes. Nous en sommes encore à la genèse.
Après Avignon, quels seront vos projets ?
J’ai un film qui sort en octobre prochain, une comédie dramatique qui s’appelle Choeur de rockers avec Mathilde Seigner, Andréa Ferréol, Bernard Lecoq, Myriam Boyer… Il s’agit d’une chorale à Dunkerque, composée de personnes âgées ou de retraités qui, au lieu de chanter de petites comptines aux enfants, se sont mis à interpréter du rock en tournée dans toute la France !
Propos recueillis par Laurent Schteiner