Théâtre : « Fay » de Claude Amiel Godefroy

La Shoah met en lumière toutes ces vies brisées et ces destins qui ont conduit les familles juives sur le chemin de l’exil abandonnant tout derrière elles. Julie Aron Amiel, petite fille de Fay, s’empare de l’histoire de sa grand-mère afin de retracer cette vie incroyable. Avec la complicité de Elsa Amiel qui assure une mise en scène précise et délicate, Julie Aron Amiel interprète Fay. Sur les routes de l’exil, elle rencontrera David en France, venue de Pologne avec sa famille. Leur rencontre puis leur amour scelleront le point d’orgue de l’union de ces deux familles à la recherche d’un havre de paix, de vie, un refuge. A travers ces vies cabossées, on assiste en toile de fond à l’horreur d’une guerre qui a sacrifié près de 6 millions d’âmes. La musique et le jeu sobre des comédiens contribuent à donner une force à ce spectacle dont l’émotion ne peut que nous submerger. Emmenant avec eux dans leurs bagages le Yiddish qui tient lieu de pont entre tous les juifs d’Europe de l’Est, ils n’oublient pas leur attachement à la tradition. Dans cette pièce, tout est présent, les justes, l’occupation, la collaboration… Ce spectacle brille par son intensité tant la sobriété prend tout son sens à la faveur de ces familles ballotées par le souffle de l’histoire. Mais de cela, les juifs  en connaissent l’amère réalité et le chemin de l’exil reste intrinsèquement une option envisageable à tout moment. Ce spectacle vient à point répondant à une actualité brûlante dont les morsures ravivent les souffrances de la Shoah. Saluons la performance des comédiens qui ont su nous embarquer dans cette histoire haletante qui nous appelle à une plus grande vigilance.

Laurent Schteiner