le Collectif Les Impromptus s’est emparé de l’Å“uvre culte de Fausto Paravidino qui se donne actuellement au Théâtre de Ménilmontant pour 2 représentations exceptionnelles avant d’entamer une tournée. Mis en scène par Yannis Moussouni cette tragi-comédie explore les rapports intenses et intimes, multiples et contradictoires à l’intérieur d’une famille déchirée. La famille, véritable laboratoire de l’humanité, permet de développer ce suprême besoin qu’est l’amour.
 Le médecin du village sait que les maladies sont loin d’être toujours là où on les attend. Si le patient semble être le père Luigi, colérique et « légèrement » sénile, il est loin d’être le seul touché et ses enfants présentent tous trois de troublants symptômes. Marta met de côté sa vie pour s’occuper des autres, Gianni ne sait pas quoi faire de ses dix doigts et Maria se demande si son Fulvio l’aime vraiment ou s’il ne lui préfère pas son meilleur ami Fabrizio. Il faut à Marta deux morts pour faire un deuil. A Maria, deux amoureux pour parvenir à être seule. Gianni, qui aime la dialectique, le souligne : tous doivent guérir – mourir ou renaître à la vie. De quiproquos amoureux en mésaventures tragicomiques, ce petit monde en pleine perte de repères et de valeurs évolue sous le regard du docteur – et narrateur – Cristofolini. Conscient que les événements arqueront sa carrière pour toujours, il dresse un portrait plein de tendresse, de désabusement et d’humour de ce qu’il appelle « la maladie de la famille M.
La maladie qui frappe la famille M. est aussi celle d’une génération, dont la pièce dresse une belle critique. L’ennui, la lassitude du quotidien et la volonté de s’en échapper cèdent le pas à la procrastination pour le faire. Comme les personnages de cette pièce, nous avons cette formidable tendance à nous empêcher de vivre, ou du moins comme on le voudrait. Tout le monde semble rêver d’un ailleurs, d’un « autre chose » mais repousse le départ, le changement. Le fait de rester dans sa zone de confort – ou d’inconfort – y participe activement, tandis que l’on continue de s’inventer des prétextes, des problèmes (inconsciemment ou non) et de tenir irrésolus ceux existants. Stagner, laisser l’incertitude gagner en quelque sorte. J’y vois aussi outre mesure, un certain parallèle avec nos rêves de comédiens, d’artistes. L’art apparait comme notre ailleurs et nécessite que l’on s’y jette corps et âme. Pourtant, le doute et la peur de l’exprimer, l’angoisse de l’échec – voire de la réussite – prennent parfois le pas sur la passion.