Théâtre : « Le journal d’un fou » de Nikolaï Gogol
Ronan Rivière nous revient au Lucernaire avec son nouveau spectacle, Le journal d’un fou. Son spectacle décrit les turpitudes d’un personnage haut en couleur frappé de schizophrénie. Ronan Rivière crée pour l’occasion un personnage dont la truculence et l’humour enrichissent l’oeuvre de Nicolaï Gool par des ajouts bienvenus des Nouvelles Pétersbourgeoises.Â
Il y a dans toute folie, le désir manifeste d’échapper à une réalité par trop prégnante. De facto, la folie demeure pour certains un refuge salutaire susceptible de les protéger. Il en est de même pour Avksenty Ivanovitch Poprichtchine dont la vacuité de son existence est corrélée par la médiocrité intrinsèque qui l’assaille. Fonctionnaire falot et effacé, il travaille au sein d’un ministère comme employé à tailler les plumes de son directeur et à gérer quelques dossiers. Frustré professionnellement, il est, par ailleurs, obsédé par Sophie, la fille du son directeur. Sa raison bascule progressivement et la folie s’empare de lui sous la forme d’une schizophrénie. Englouti dans une ville tentaculaire, Il tente par sa singularité et son humour à tout crin de faire bon coeur contre mauvaise fortune. La révélation de l’amour de Sophie pour un autre lui procure une douleur insoutenable. Son imaginaire vient à la rescousse afin de l’empêcher de sombrer définitivement. Mavra, sa domestique assure la narration de son maître tantôt avec une distance amusée tantôt avec effroi. Battant de plus en plus la campagne, il finit par se terrer définitivement dans un univers extravagant et ubuesque susceptible d’apaiser sa douleur extrême. Face à ses frustrations professionnelles et sentimentales, la folie qui le gagne et qui ne l’a jamais trahi, devient son seul rempart, son ultime protection.
La scénographie pensée comme un plancher incliné et bancal tient lieu de bureau, d’appartement, de lit avec une trappe représentant tantôt une fenêtre tantôt une sortie. Ce décor bancal rappelle la vie de Avksenty Ivanovitch. La musique de Prokofiev, interprétée par Olivier Mazal, qui accompagne ce spectacle souligne les phases obsessionnelles et d’enthousiasme vécues par Poprichtchine. Soulignons la performance de Ronan Rivère qui a bâti un personnage haut en couleur dans une dimension pleine et entière des personnages de Gogol. Amélie Vignaux n’est pas en reste en interprétant avec brio la servante de Avksenty Ivanovitch et en maintenant un fil narratif avec le public. L’espace d’une soirée, Ronan Rivière nous a transporté, pour notre plus grand plaisir, dans la Pétersbourg de Gogol, en nous narrant une histoire abracadabrante dont cet auteur mythique en avait le secret.
Laurent Schteiner
« Le journal d’un fou » de Nicolaï Gogol
Adaptation et mise en scène de Ronan Rivière
AVEC
Ronan Rivière, Amélie Vignaux et au piano Olivier Mazal
- Scénographie : Antoine Milian
- Lumières : Marc Augustin-Viguier
- Musique : Sergueï Prokofiev interprété par Olivier Mazal
- Crédit Photos : Ben Dumas
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du mardi au samedi à 21h, le dimanche à 17h30
Jusqu’au 10 décembre 2023