Le Théâtre de Belleville accueille en ce moment la  belle reprise d’un spectacle de Mathieu Touzé « Un garçon d’Italie ». Portée à la scène par trois talentueux interprètes, cette adaptation du roman de Philippe Besson se caractérise par une mise en scène particulièrement sobre et épurée qui laisse la part belle à une délicate éclosion de chacun des personnages. Une ode mélancolique au sentiment amoureux, une quête de vérité de toute beauté.
C’est une histoire triste et belle, une de celles qui commencent par la mort. Luca lui-même nous la raconte cette mort, la sienne, sa noyade dans les eaux sombres de l’Arno. Bouleversements dans sa famille, choc de sa compagne, aucune explication rationnelle en vue, lui, si jeune, parti comme ça si vite…tout le monde attend alors fébrilement le verdict de l’autopsie, pour savoir, pour comprendre. Pour Anna son amour, c’est le vide, la sidération. Pour Léo son amant c’est une violence insurmontable de plus dans une vie déjà faite d’épreuves. Une double enquête commence aussi bien celle de la police, que celle que vont mener les trois personnages en questionnant leurs sentiments, leurs trajectoires, leur vie.
Mathieu Touzé s’empare du texte de Philipe Besson avec beaucoup de sensibilité mais aussi avec audace. Sa mise en scène est en effet extrêmement sobre, le plateau est entièrement nu, seul les trois acteurs créeront un mouvement sur la scène, un chassé-croisé lent et mélancolique fait de face-à -face, de frôlements, de lignes et de traversées où les regards ne se croisent pas toujours. Tout le poids de cette intrigue si chargée d’amour, de douleurs, de secrets et de mystère repose alors sur l’interprétation au cordeau d’Estelle N’Tsendé, Yuming Hey, et Mathieu Touzé lui-même. Les récits, les points de vue des protagonistes de ce triangle amoureux s’enchevêtrent magnifiquement, et les mots que chacun met sur son ressenti intime sont sublimés par la simplicité de leur aveux. Ainsi cet oratorio à plusieurs voix bouleverse autant qu’il tient en haleine, le spectateur est tantôt intrigué par la résolution du mystère autour de la mort de Luca puis désarmée par la beauté de cette histoire d’amour. Au fur et à mesure les langues se délient, les corps s’affaissent, les regards se voilent découvrant encore un peu la fragilité derrière l’apparente résistance à la douleur. L’écriture de Philippe Besson dans ce dispositif résonne d’un éclat particulier, c’est comme un cadeau, cette vérité toute nue que les personnages nous adressent, un don du coeur assurément.
Audrey Jean
« Un garçon d’Italie » D’après Philippe Besson
Mise en scène Mathieu Touzé
Avec Estelle N’Tsendé, Mathieu Touzé, Yuming Hey
Création lumière Renaud Lagier
Le texte Un Garçon d’Italie de Philippe Besson est édité aux éditions Julliard.
Théâtre de Belleville jusqu’au 28 Mai
Les lundis à 19H, les mardis à 21H15
Les dimanches à 17H30